Saturday, February 3, 2007













Ad-Daghih alias Ad-Darih
Le sanctuaire inviolable des 14marsistes


Qu'ils dégringolent des hauteurs d'Achrafieh ou qu'ils arrivent après une longue promenade des quartiers populeux de Beyrouth Ouest, les fervents du mouvement dit du 14 mars affluent par grappes entières vers un point de convergence unique: le mausolée de Rafic Hariri. Cela remonte à 2005, au lendemain de l'assassinat qui continue, deux ans après, à agiter le Liban et les chancelleries occidentales.

Pour les uns, la visite du Daghih (le R grasseyé est une question d'étiquette pour un habitant d'Achrafieh qui se respecte) était un rendez-vous obligé pour rendre hommage au "héros" sunnite qui par sa mort atroce a fait basculer toute une communauté vers la "libanité" et l'a fait ainsi rejoindre les maronites et les chrétiens en général dans leur lutte interminable pour un Liban affranchi de la tutelle syrienne.

Pour les autres, majoritairement sunnites, Ad-Darih (le R roulé est ici de mise) est tout simplement un sanctuaire. Ils y venaient pour réciter "Al-Fatiha", verser s'ils le peuvent quelques larmes et se lamenter sur une mort qui a laissé l'ensemble de leur communauté orpheline d'un chef qu'elle a quasi unanimement adoré.

Dans un pays dont les différentes communautés se nourrissent de symboles et en inventent quotidiennement de nouveaux pour défendre la cause du moment, Rafic Hariri, qu'il ait été personnellement adulé ou honni de son vivant, est devenu après sa mort un symbole d'une catégorie supérieure puisqu'il se trouve à l'intersection d'un rêve commun et d'une variété de chimères transversales.

Beaucoup d'autres "martyrs" sont tombés depuis. Ils sont venus rejoindre le panthéon érigé par le mouvement du 14 mars à la gloire d'une lutte qui peine à garder sa cohésion face aux assauts répétés d'un régime aux abois dont la survie dépend largement du soutien quasi inconditionnel qui lui est prodigué par son puissant allié libanais et par le parrain lointain de ce dernier.

Quoi qu'il en soit, les foules autour du sanctuaire se sont depuis longtemps éparpillées et les larmes sont devenues de plus en plus rares. Le lieu n'a pas perdu pour autant son caractère inviolable. Une barrière invisible le protège contre les actes "blasphématoires". Aujourd'hui, un drame se profile à l'horizon :

L'anniversaire de l'assassinat approche à grands pas et le sanctuaire occupe la place qui accueille habituellement les rites et les cérémonies des 14marsites. Or, à quelques pas, les 8marsistes tiennent le pavé et s'y enracinent.

Une course contre la montre s'est engagée pour empêcher une collision frontale généralisée et maintes fois évitée, entre tenants du 8 et adeptes du 14. Dans ce suspense "insoutenable", Hassan Nasrallah souhaite l'accalmie sans s'y engager vraiment. Le Général continue à ruer dans les brancards. La Syrie trépigne. L'Iran hésite. L'Arabie Saoudite n'arrête pas de jouer les pompiers sans vraiment y parvenir !

Les Libanais, quant à eux, se morfondent dans une attente anxieuse.