Tuesday, July 12, 2011






















Langage de chiens

Il n'est pas toujours évident de comprendre le langage des chiens et l'on est souvent réduit à des conjectures pour donner un sens à leurs aboiements. Mais lorsqu'un être humain traite un autre être humain de chien, lorsqu'il s'entend rétorquer: chien toi-même et lorsqu'ils se mettent tous les deux à aboyer en phase, alors là, ça devient franchement inextricable. C'est exactement ce qui s'est passé récemment au Parlement et il a fallu les jappements répétés du chien de garde Nabih Berri pour ramener les deux canidés, Assem Qanso et Khaled Ad-Daher, à leur "humanité".

Ceux qui apprécient la compagnie des chiens vous assurent qu'il n'y a point de mystère là-dedans et qu'ils perçoivent sans difficulté le sens de leurs aboiements. Des spécialistes ont même réussi à en répertorier les nuances et à les codifier. Ainsi, selon eux, plus les aboiements sont rapprochés, plus le chien est inquiet. Moins le son est grave et profond, moins le chien est sûr de lui et inversement. Il existe donc bien un code et une interprétation du langage canin.

Assem Qanso et Khaled Ad-Daher ont défrayé la chronique, mais ils ne sont pas les seuls à aboyer. Toute la meute politique libanaise le fait avec plus ou moins de véhémence. En prêtant attentivement l'oreille et en suivant de près les explications fournies par les éthologues, on pourrait construire une table de correspondance attribuant à chaque type d'aboiement, sa signification et le canidé correspondant.

En voici quelques exemples pris au hasard:

Aboiements suivis d'un long hurlement: Attention à toi ! Où est le reste de la meute ? (Hassan Nasrallah)

Enchaînements de 3 ou 4 aboiements: Il y a un problème ici, mais je ne sais pas lequel (Michel Aoun).

Succession d'aboiements et de pauses: Où êtes vous ? Je suis tout seul ! (Saad Hariri).

Jappements étouffés: Je suis mort de peur ! (Walid Joumblatt)

Passant du grave à l'aigu entrecoupé d'un petit aboiement: Je m'ennuie, venez me chercher ! (Michel Sleiman)

Un seul jappement très bref et aigu: Ouille ! (Najib Miqati)

Aboiement modulé en bâillement: Ouais ! Super ! (Nabih Berri)

Aboiements sourds et profonds semblant venir du fond de la gorge: Recule, dégage ! (Ali Ammar)

Un, deux ou trois aboiements sonores sur un registre plutôt élevé: Bonjour ! (Sami Gemayel)

Successions rapides d'aboiements de tonalité moyenne: Un intrus est là, rassemblez vous ! (Samir Geagea)

Aboiements bégayés de tonalité moyenne: Viens jouer avec moi (Ammar Houri)

Il ne viendrait jamais à l'esprit d'un humain de traiter un autre humain d'humain. Pour l'insulter ou l'avilir, il le qualifierait volontiers d'animal ou plus explicitement d'âne, d'hyène, de chien ...etc. Au Liban, traiter un adversaire de traître ou d'espion n'émeut plus personne, mais le traiter publiquement de chien apporte une fraicheur toute nouvelle qui manquait cruellement au débat public. Et au train où vont les choses, il n'est pas impossible de voir un jour débarquer toute la ménagerie avec son répertoire de braiments, meuglements et autres grognements.