Tuesday, February 8, 2011






















Amiralay ou l'art de chatouiller la vie

"L'ironie, chez moi, est un moyen de noyer le désespoir en s'obstinant, en le prenant de haut, en se prétendant au-dessus des blessures, en démentant ce sentiment d'impuissance, en refusant de se laisser aller à la douleur, en se rebellant contre elle. En d'autres termes, l'ironie est l'expression d'un dépit personnel devant l'absurdité de la vie, devant son injustice, et devant le rôle joué par l'homme, qui ne cesse de la rendre plus absurde et plus injuste encore.
Un autre aspect de mon travail cinématographique qui traduit l'une de mes angoisses majeures, c'est la recherche de la vérité, une vérité dont l'un des piliers, à mon avis, est le doute. Une forme de suspicion que je considère comme une vertu, et non comme un péché selon la formule attribuée au Coran, "Tenir en suspicion est presque un péché", comme le veulent ceux qui s'en remettent aux vérités révélées et aux livres saints. Car toute vérité, à mon sens, est douteuse, ambiguë, relative, tant que la conscience humaine et l'Histoire ne l'ont pas soumise à une interrogation, à la loi du questionnement. C'est peut-être cela qui explique cette oscillation dans mes films entre le documentaire et la fiction, que j'attribue à une tendance enracinée en moi à me frotter au doute, à chatouiller l'ambiguïté. En deux mots, mon cinéma pourrait être résumé à cela : chatouiller la vie…"

Omar Amiralay

Le cinéaste syrien Omar Amiralay est décédé le samedi 5 février à l'âge de 67 ans à Damas.