Friday, June 19, 2009















Une volée de sahsouhs tous azimuts

On juge de la qualité d'un "sahsouh" par le son répercuté qu'il produit au moment où il est administré. Cette claque assénée d’un seul grand coup de paume sur la nuque est souvent ressentie par la victime comme une humiliation insupportable. D'abord, parce que le sahsouh arrive toujours à l'improviste, ensuite parce que celui qui le subit n'a aucun moyen de le prévenir, et enfin parce que sa "morsure" est aussi douloureuse que celle de la piqûre d'une guêpe. Lorsqu'il tombe en virevoltant, la victime a souvent la tête ailleurs.

Que dire alors lorsque le sahsouh est collectif, lorsqu'il atteint non pas un seul, mais tout un groupe d'individus, lorsqu'il est asséné par la majorité d'un peuple à ses bourreaux ? Dans ce cas, il prend des dimensions et des significations presque inimaginables. Ce n'est plus la claque bruyante décrite plus haut, mais bel et bien une correction politique en bonne et due forme. C'est exactement ce qui est arrivé à Hassan Nasrallah, à Michel Aoun et au menu fretin qui complète la nébuleuse du 8 mars. Une majorité du peuple libanais vient de leur administrer un sahsouh politique de toute beauté et à l'exacte mesure de leur suffisance.

Hassan Nasrallah ne s'en est pas encore remis. Lui, qui était à deux doigts d'élargir son bastion à la totalité d'un pays, le voici cloîtré à jamais dans son fortin, en train de cuver sa défaite et ruminer les vengeances à venir. Son acceptation du verdict des urnes a duré à peine une semaine. Il faut dire que l'humiliation était tellement insupportable qu'il ne pouvait pas se résoudre à accepter les règles du jeu démocratique. Il est donc revenu nous seriner ses griefs et, tout en jurant ses grands dieux de ne pas vouloir remettre en cause l'accalmie (cette belle mascarade appelée "tahdi'a"), brandir ses menaces et nous promettre un bouquet d'obstructions en perspective.

Mais laissons Hassan panser comme il peut son orgueil blessé et regardons plus loin. Car le fameux sahsouh n'a pas eu qu'un effet local, oh que nenni ! Ses ondes de choc se sont propagées nettement au-delà de nos frontières et d'abord chez le dictateur d'à-côté. Même si Bachar El-Assad feint d'accepter sans moufter le résultat des élections, il est forcé de reconnaître qu'il a bel et bien reçu la claque de plein fouet. Occupé à soigner son image auprès de Sarkozy et d'Obama, il se tient coi en rongeant son frein. Et dire qu'il ne peut plus assassiner à sa guise comme au bon vieux temps. Quelle misère !

Passons maintenant à la république fasciste islamique. Les temps sont vraiment durs. Deux sahsouhs liftés croisés à la fois, c'est plus que ne peut supporter le grand manitou et accessoirement Wali Al-Faqih, Ali Khamenei. D'abord le sahsouh libanais, la dérouillée du Hezbollah aux élections est aussi la sienne et celle de son protégé Ahmadinejad qui nourrissaient tous les espoirs de voir enfin leur investissement de longue durée produire ses fruits. Hélas, il va falloir patienter encore. La précieuse "carte libanaise", qui allait devenir un atout majeur dans le grand "bargaining" qui s'annonçait, ne vaut plus rien. Mais il y a pire, car à peine relevé du sahsouh libanais, le voilà qui doit faire face à un autre fait maison et concocté par des millions d'Iraniens. Bien entendu, nous ne pouvons que compatir. he he, comme dirait un romancier libanais !

Dire qu'il existe un lien entre les deux sahsouhs est une idée qui plaît fortement aux Libanais toujours en soif de revanche, mais elle est complètement farfelue, il faut le reconnaître. Qu'importe, deux sahsouhs valent mieux qu'un. En se conjuguant ils pourraient conjurer, au moins pour un temps, les visées hégémoniques iraniennes. C'est toujours ça de pris !

Un Sahsouh est souvent accompagné du mot "Naeeman" (tiens, prends, ou enjoy !) d'abord pour en accentuer l'effet psychologique, mais aussi pour préparer la victime à l'inévitable moment de contact. À Beyrouth, à Damas et à Téhéran, le contact a été parfaitement réussi. De tout cœur, nous disons donc à Hassan Nasrallah, Michel Aoun, Bachar El-Assad, Ali Khamenei et AhmadiNejad: Naeeman !