Sunday, April 4, 2010












Un « acte de mémoire »

Pureté et élégance. Un texte éblouissant tant par la beauté du style, la force de l’argument et l’oscillation constante entre un présent impossible et un passé omniprésent qui ne cesse de le ramener à lui pour mieux l’engloutir. On y trouve toutes les constantes politiques qui jalonnent depuis longtemps une rhétorique devenue presque familière pour ses lecteurs, mais cette fois, Waddah Charara réussit un petit chef-d’œuvre d’éloquence et de fluidité "poétique" (le trait n'est pas forcé).

Ce qui frappe d’emblée, c’est la facture littéraire d’un texte éminemment politique qui s’aventure sur les territoires de la métaphysique (comme il le souligne lui-même) pour aborder d’une manière totalement inédite le problème du nationalisme arabe et de la récurrence de ses poncifs.

Un "acte de mémoire". Waddah se rappelle de cette définition du nationalisme donnée par un Edmond Rabbath encore tout jeune et pas encore la "référence" que nous connaissons et constate que cette définition a été reprise et adoptée à l’identique, vingt ans après, par Michel Aflaq, le fondateur du parti Baath. C’est le point de départ de l’article dans lequel, Waddah commence par raconter les péripéties de son entrevue avec Edmond Rabbath devenu octogénaire et le sourire de satisfaction de celui-ci lorsqu’il lui fait part de sa "trouvaille". Ah ! quel romancier il aurait pu être si Waddah Charara l’avait voulu.

Après ce long préambule, Charara abandonne Rabbath croulant sous ses livres et se lance dans un exercice "métaphysique" époustouflant sur le fonctionnement de la mémoire, sur sa logique circulaire et sur la manière dont l’identité de l’individu se dilue dans celle du groupe. Et si, pour illustrer son propos, Waddah se sert d’un Omar Karamé, d’un Hassan Nasrallah ou d’un Walid Joumblatt c’est pour souligner s’il était nécessaire l’unicité du concept malgré la disparité des acteurs.

C’est le "Contr’un" de Waddah. A lire, à relire et à diffuser auprès de ceux qui savent lire.

Le texte est publié par An-Nahar et non par Al-Mustaqbal comme à l’accoutumée. Waddah Charara est "hébergé" par son ami Mohammad Abi Samra et non par Jihad El-Zein qui s'entête depuis longtemps à lui fermer l'accès aux pages de "sa" rubrique.