Tuesday, February 20, 2007














L'art d'avaler les couleuvres

Je ne sais pas s'il existe un art pour avaler les couleuvres, mais la consommation de ces reptiles est fortement recommandée pour celui qui veut accéder au pouvoir ou jouer au courtisan. Cela suppose, en langage courant, être disposé à subir tous les affronts et toutes les vexations sans broncher.

Parmi nos "acteurs" locaux, nous disposons d'un avaleur patenté, car non seulement il passe son temps à en ingurgiter, mais en plus il s'en délecte et le fait savoir. Il s'agit, bien entendu, de notre "conscience nationale", Salim Al-Hoss dont je vais vous raconter sa magnifique "dernière".

Notre valeureux bonhomme a donc pris son bâton de pèlerin et s'est rendu en Arabie Saoudite prendre la bénédiction de Messire Abdallah avant d'aller à Canossa (alias Damas) faire acte de soumission devant son ami Bachar.

Le jeune dictateur l'accueillit chaleureusement dans son "palais du peuple" et l'installa à sa droite en signe d'estime (dixit Al-Akhbar). Voici la conversation qu'ils ont eue, telle qu'on peut aisément l'imaginer:

Salim: avec l'immense respect que je vous dois, je voudrais vous rapporter, votre honneur, ce que les mauvaises langues à Riyad et à Beyrouth racontent à votre sujet.

Bachar: Parlez sans crainte, cher ami, vous n'êtes pas sans savoir l'immense estime que je vous porte ainsi qu'à votre action pour défendre mon régime contre ses détracteurs.

Salim, ravi, se plie en courbettes et dit: d'aucuns prétendent que vous vous opposez au tribunal international. Croyez-moi, je ne fais que rapporter…

Bashar: écoutez-moi, je vais vous faire une confidence. Je puis vous affirmer solennellement que l'idée de m'y opposer ne m'a jamais effleuré l'esprit ! Je dirais même plus, je suis prêt à accepter tout ce que les Libanais décident entre eux à ce sujet et je vous autorise à le répéter en mon nom !

Salim ne croyait pas ses oreilles et, comblé de joie, il attrapa la couleuvre au vol et s'empressa de l'avaler. Après avoir tout digéré, il se caressa le ventre de rassasiement, remercia son illustre hôte et prit congé.

De retour à Beyrouth, il convoqua les journalistes et leur relata dans le menu son extraordinaire aventure. Cette histoire est authentique ! Consultez votre journal favori, vous y trouverez tous les détails. Mais elle est loin d'être terminée, car aux dires de la presse, Salim envisage une troisième étape qui le conduira à Téhéran.

Avec un peu de chance, il se verra peut-être offrir un petit boa !