Monday, August 6, 2007


















Pyrrhus face au miroir chrétien

Encore une victoire comme celle-ci et Michel Aoun fera définitivement partie des mauvais souvenirs. Le talisman a été brisé et ceux de ses coreligionnaires, qui se sont laissé subjuguer pendant longtemps par ses tours d'illusionniste, se sont enfin réveillés d'un long et pénible cauchemar.

En lui infligeant cette courte victoire, les Maronites, les Grecs-Orthodoxes et les Grecs-Catholiques viennent en fait de donner une vigueur renouvelée à leurs choix souverainistes fondamentaux et réaffirmé haut et fort leur attachement à l'indépendance. Ils ont signifié au Général et de la manière la plus éclatante qu'ils rejetaient désormais sa "représentativité exclusive" et oppressante sans pour autant plébisciter Amine Gemayel dont l'immoralité n'a rien à envier à celle de son adversaire.

C'est aussi une réponse cinglante au nombrilisme, aux "alliances contre-nature" et aux contradictions de plus en plus fréquentes du Général.

Contrairement aux analyses hâtives, les Arméniens se sont intégrés aussi à leur manière dans ce choix salvateur. Oublions vite l'arithmétique des voix, oublions aussi les âneries racistes proférées par un Gabriel El-Murr au cours de la soirée électorale et oublions enfin le clientélisme qui a permis à sa crapule de frère de "briller" encore une fois sur le dos des villageois. Tournons-nous plutôt vers cette leçon magistrale de politique que le Tachnag a assénée à l'ensemble de la classe politique ainsi qu'aux autres communautés.

Loin de chercher à se justifier d'avoir voté massivement en faveur de leur allié, les Arméniens y ont trouvé au contraire de quoi s'en enorgueillir. Mais tel n'était pas leur but. La bataille électorale leur a fourni une occasion en or pour sortir enfin du ghetto dans lequel les autres Libanais voulaient systématiquement les y confiner. Leur vote avait valeur d'avertissement: la communauté arménienne ne servira plus de pont ni de réservoir de voix pour valider les choix politiques des autres. Elle existe désormais pour elle-même, mais aussi pour le Liban.

La victoire à la Pyrrhus du Général ouvre et de façon inespérée le paysage politique. Maintenant que l'hypothèque est levée, le camp des souverainistes, que Michel Aoun a inconsidérément déserté, peut à nouveau se recomposer vers plus de cohérence et de clarté. Évidemment, il peut continuer à jouer le matamore, mais il serait mieux inspiré de rejoindre vite son camp d'origine. Autrement, il ne lui restera plus que sa coterie pour panser son ego meurtri.

Aujourd’hui est un autre jour. La communauté chrétienne réimpose son tempo à la lutte pour l'indépendance. Les jours à venir ne peuvent être que meilleurs.