Thursday, September 30, 2010





















Ces empêcheurs d'assassiner en rond

Si on ne peut plus assassiner en toute tranquillité, ce n'est plus la peine de faire de la politique. Non, mais ho !

C'est à peu de choses près ce que le parti chiite armé et ses sbires voudraient faire admettre petit à petit à tous ceux qui oseraient s'opposer à leurs oukases. Le propre d'un despote est de vous annoncer sans ciller que la terre est plate ou que soleil est carré tout simplement par ce qu'il en a décidé ainsi ou bien par ce que le cours des évènements se trouve être en contradiction avec ses fantasmagories. Le despote absorbe toutes les valeurs dans la sienne, réduit aux siennes toutes les vues.

Il n'est pas facile d'endosser l'habit du simple criminel après avoir arboré avec morgue les lauriers du résistant exemplaire. Depuis qu'il se sait accusé, Hassan Nasrallah a sombré dans une panique indomptable à l'idée de perdre une légitimité forgée par des années de sacrifice supposément désintéressé. Il a beau jurer de son innocence, ses dénégations répétées ne parviennent à émouvoir que les imbéciles et confirment les soupçons nourris à son encontre. Ses apparitions stroboscopiques ont eu autant d'effet qu'un pet dans une tempête. Ses hommes de main, accourus à la rescousse, se sont lancés dans une campagne d'intimidation dont le ridicule n'a d'égal que l'insignifiance.

Les Libanais, sommés de choisir entre la peste et le choléra, ne veulent pas entendre raison. Fichtre ! Ils sont bouchés à l'émeri ou quoi ?

Ni les flatteries, ni les menaces n'ont réussi à venir à bout de leur obstination, une obstination obtuse qui ne le quitte plus depuis qu'ils ont eu cette idée incroyable qu'un assassin doit payer le prix de ses crimes. L'idée est en effet follement incroyable, puisqu'elle va à l'encontre d'une longue tradition qui veut que l'assassinat politique soit le prolongement de la politique par d'autres moyens. D'habitude et après chaque assassinat, ils se lamentaient un coup, maudissaient le sort, puis vaquaient et puis, un jour, un homme politique a été fauché à l'explosif. Ce jour-là, contre toute attente, ils avaient décidé que c'en était assez. Les braillards échevelés qui s'étaient rassemblés dans un élan unanime venaient en fait de franchir le Rubicon. Pour l'assassin, c'était à peine tolérable de voir son droit de tuer ainsi contesté. Sa réponse n'a pas tardé, et, face à cette effronterie, il s'est transformé en serial killer et, au lieu d'un seul assassinat, il en a commis plusieurs.

Cinq années sont passées et malgré la défection d'un Joumblatt (qui joue à l'entremetteuse pour mieux cacher son ignominie) et la compromission d'un Hariri (qui fait un pas en avant et deux pas en arrière), la détermination des Libanais n'a pas fléchi. Mais l'heure des bilans est enfin arrivée. Le criminel acculé au pied du mur menace, tel un Samson qui a perdu sa barbe et son turban, de faire s'écrouler tout l'édifice.

Hassan Nasrallah sait qu'il a tué et il sait qu'on sait qu'il a tué, mais il n'en a cure, plutôt le suicide collectif que de perdre son honneur.