Saturday, August 20, 2011




















Obama bouffe du lion

On ne sait pas vraiment ce qui a poussé le président américain à sortir enfin de sa léthargie. A-t-il attendu que le nombre des victimes atteigne un certain score, ou bien accordait-il au tyran le délai nécessaire pour mater la révolution ? Le carnage s'est poursuivi pendant des mois sans que les Etats-Unis ne parviennent à définir une ligne de conduite.

Vilipendé à l'intérieur aussi bien qu'à l'extérieur pour ses tergiversations, Obama est arrivé à cette décision, à un rythme désespérément lent en comparaison avec ses appels immédiats pour que Moubarak, pourtant ami et allié des Etats-Unis depuis trois décennies, quitte le pouvoir après avoir déchaîné la violence contre des manifestants pacifiques dans son pays. Assad, en revanche, l'ennemi juré des Etats-Unis et l'allié indéfectible de l'Iran, semblait entouré d'égards incompréhensibles. Pendant des mois l'administration Obama l'a appelé à entreprendre des réformes politiques, a limité ses mesures punitives pour les membres individuels du régime, et a travaillé en vain pour obtenir une condamnation par le Conseil de sécurité des Nations Unies.

Chat échaudé craint l'eau froide. L'extrême prudence d'Obama s'explique par ses déboires avec les précédents soulèvements arabes. En effet, sa décision "précipitée" de pousser Moubarak à la porte avait suscité de profondes inquiétudes parmi les amis arabes des Etats-Unis. Pour les rois et les cheiks d'Arabie, la superpuissance de laquelle ils dépendaient pour leur sécurité extérieure semblait s'être transformée en une menace pour leur sécurité intérieure. D'un autre côté, la réticence évidente d'Obama à engager les ressources militaires pour forcer le départ du dictateur libyen a ouvert un écart entre un objectif clair des États-Unis et les moyens déployés pour y parvenir. Résultat des courses: précipitation d'un côté, inconséquence de l'autre et pour couronner le tout, perte de crédibilité.

Assad est donc devenu le bénéficiaire involontaire de l'expérience d'Obama ailleurs dans le monde arabe. C'est la raison pour laquelle le président américain a attendu cette fois que ses alliés régionaux, notamment l'Arabie et la Turquie s'engagent ouvertement contre le régime syrien avant qu'il ne se prononce à son tour.

Il en a mis du temps, mais mieux vaut tard que jamais.

L'appel soigneusement élaboré affirme clairement que "l'avenir de la Syrie doit être déterminé par son peuple", qu'il ne sera pas imposé par les États-Unis ou d'autres puissances extérieures, il souligne aussi que les Etats-Unis ont l'intention d'aider le peuple syrien pour la défense de leurs droits universels, en isolant le régime syrien, et en imposant des sanctions qui vont entraver la capacité d'Assad à poursuivre sa répression brutale. Certes, l'isolement international et les sanctions ne seront pas suffisants pour faire chuter le tyran, mais ils apportent la bouffée d'oxygène tant attendue par les Syriens et les inciteront à poursuivre leur résistance courageuse.

Ce sera long et ardu. Le régime alaouite minoritaire se trouvant ainsi acculé a jouer pour sa survie, redoublera de férocité. Mais son sort est définitivement scellé, car tôt ou tard, les élites d'affaires sunnites à Damas et Alep qui continuent à servir de rempart pour le régime, finiront par se séparer de lui, l'armée, déjà placée sous une pression considérable par des mois de déploiement de la force contre son propre peuple, finira aussi par se fissurer… mais ne précipitons pas les choses, à chaque jour suffit sa peine. Et sa joie aussi !